Des villages connectés : pourquoi un transport à la demande dans le secteur ?

Un matin de janvier, sur la place de Villiers-en-Lieu, une habitante m’a glissé : « Sans voiture, ici, on est bloqués. » Plus qu’une impression, c’est une réalité partagée dans beaucoup de petites communes de Haute-Marne. Les lignes de bus régulières sont rares, les horaires souvent inadaptés. Pourtant, la demande de mobilité, elle, ne faiblit pas : pour rejoindre la gare de Saint-Dizier, aller à un rendez-vous médical, se rendre au marché, visiter une amie ou suivre une formation. Le transport à la demande (TAD) incarne aujourd'hui une réponse concrète, locale et souple à ces besoins multiples. Depuis quelques mois, un nouveau service a fait sa place discrètement mais sûrement à Villiers-en-Lieu... et autour.

Le TAD en Haute-Marne : organisation pratique et zones desservies

Le transport à la demande n’est pas tout à fait un bus, ni vraiment un taxi, mais il combine souplesse et mutualisation des trajets. Ici, il s’inscrit dans la volonté du Conseil départemental de lutter contre l’isolement rural et de faciliter les déplacements vers les pôles d’activité, de santé ou de commerce (Conseil départemental de la Haute-Marne).

Dans le secteur de Villiers-en-Lieu, le service devenu visible en 2023 s’appuie sur le réseau Proxibus (exemple : secteur Saint-Dizier Sud-Est), ainsi que sur une organisation spécifique couvrant 15 communes alentours, dont Humbécourt, Chancenay, Bettancourt-la-Ferrée et Laneuville-à-Rémy. La configuration des trajets repose sur des lignes de rabattement vers des destinations-clefs : marché, centre médical, pôle administratif, gare SNCF de Saint-Dizier.

  • Horaires : Essentiellement du lundi au samedi (hors jours fériés), de 7h30 à 19h.
  • Jours de passage : Jusqu’à 2 allers-retours par jour et par secteur sur réservation préalable.
  • Lieux de prise en charge : Arrêts officiels des communes ou domiciles, selon les conditions d’accès (à vérifier lors de la réservation).

Anecdote : Près de 30% des trajets depuis Villiers-en-Lieu concernent des personnes âgées se rendant au centre hospitalier de Saint-Dizier (source : CC du Bassin de Joinville en Champagne).

Comment réserver un trajet ? Étapes concrètes et astuces pratiques

L’essence du service : la réservation. Le fonctionnement demande un petit pas de côté par rapport à l’habitude de « sauter dans le car au dernier moment ».

  1. Anticiper : La réservation est indispensable, jusqu’à la veille avant 17h pour un déplacement le lendemain.
  2. Qui contacter ? Le numéro unique du service TAD Haute-Marne : 0 800 10 36 38 (service et appel gratuits), ou la plateforme en ligne.
  3. À prévoir : Jour, heure souhaitée, lieu de départ et d’arrivée, détails spécifiques (accompagnement PMR…).
  4. Confirmation : Un opérateur valide le créneau en fonction des disponibilités et optimise les trajets collectifs.

Pour une première demande, osez préciser vos contraintes : certains chauffeurs adaptaient déjà l’itinéraire pour déposer une passagère à la pharmacie ou à sa permanence d’infirmière, signe d’une proximité réelle.

  • Paiement : Le tarif est unique : 2 € par trajet dans la zone (gratuit pour les enfants de moins de 4 ans, tarifs réduits sous conditions sociales, voir la source transports.haute-marne.fr).
  • Accessibilité : Véhicules adaptés pour personnes à mobilité réduite sur simple mention à la réservation.

Une solution pensée pour le territoire : points forts et limites

Les retours sur le service dans le secteur de Villiers-en-Lieu laissent apparaître une réalité nuancée, faite de petits succès quotidiens et de points à surveiller.

  • + D’accessibilité : Le TAD répond aux besoins de ceux pour qui la mobilité est un défi : personnes âgées, non motorisées, jeunes en formation.
  • + D’économie : Le coût du trajet reste modique en comparaison d’un taxi. Par exemple, Villiers-en-Lieu / Saint-Dizier = 2 € avec le TAD contre 12 à 15 € en taxi pour la même distance (taxiprix.com).
  • + De lien social : Le même véhicule rassemble parfois un jardinier du dimanche, une mère et son enfant, ou la doyenne du village, profitant du trajet pour échanger sur la vie locale…
  • - De rapidité : Le détour pour prendre d’autres voyageurs peut rallonger le temps de trajet.

Un membre du club de marche Saint-Rémy raconte : « On a réservé pour trois, la navette nous a laissé au marché de Saint-Dizier, repartis à midi pile. C’est souple, mais il faut anticiper. »

Impact local : premiers chiffres et témoignages

En quelques mois, le service rencontre une demande croissante. Entre mars et septembre 2023, on compte déjà plus de 250 déplacements mensuels pour la seule zone couvrant Villiers-en-Lieu et alentours (source : CC futures, chiffres présentés lors du Conseil Local de la Mobilité d’août 2023).

  • Qui utilise le service ? 55% des usagers sont des personnes de plus de 60 ans, mais l’usage se diversifie rapidement, notamment avec les parcours scolaires ou le retour de consultations médicales.
  • Destinations phares :
    • Gare SNCF Saint-Dizier (35% des demandes)
    • Centre commercial Les Nations
    • Médiathèque Saint-Dizier
    • Quiétude, le centre seniors de Villiers-en-Lieu

Une étudiante de Chancenay, rentrée le week-end, souligne : « Sans voiture, c’est soit attendre deux heures, soit payer cher. Là, on réserve, c’est carré. » Une aide-soignante habitant Laneuville témoigne que le service « lève de vrais freins, surtout pour les nuits sans solution quand les lignes classiques dorment ».

Point notable : depuis l’introduction du TAD, la demande ponctuelle de transports solidaires (associations ou covoiturages bénévoles) a légèrement chuté, preuve d’un effet d’ajustement bénéfique sur l’offre globale (covoiturage-libre.fr).

Comparaison régionale et perspectives d’évolution

La Haute-Marne n’est pas la seule à développer ce type d’initiative. Le Grand Est déploie plusieurs dispositifs, en particulier dans les Ardennes et l’Aube (services « ProxiMouv’ » ou « TAD Grand Est »). Ces réseaux, souvent pionniers, montrent à la Haute-Marne que :

  • Le taux de satisfaction grimpe dès que la fréquence ou la réservation en ligne sont renforcées (94% d’usagers satisfaits dans l’Aube, source : ProxiMouv’).
  • La mutualisation avec d’autres services publics (courrier, portage de repas) est une piste explorée pour faire baisser le coût à long terme.
  • Un service d’accompagnement individuel peut émerger pour les personnes isolées sans solution familiale.

Une innovation locale : en mai 2024, le territoire expérimente une réservation par application mobile, testée dans certaines communes pilotes (infos sur transports.haute-marne.fr), pour une prise de rendez-vous plus souple.

Un service à s’approprier, des usages à inventer

Marcher sur le chemin des Dames, longer l’étang d’Ancerville, grimper dans une navette au petit matin, cliquer sur la réservation la veille… Le transport à la demande réinvente la mobilité rurale du secteur de Villiers-en-Lieu à partir d’un fait simple : la vie quotidienne n’est plus un itinéraire dicté par le manque de solution. Déjà, certains usagers mutualisent leur course, donnent leur avis pour affiner les horaires, proposent d’impliquer les associations — autant d’idées à suivre.

Le territoire y gagne plus que des kilomètres parcourus : il gagne du temps retrouvé, de l’autonomie, et ce petit élan pour aller « voir ailleurs », même si c’est juste le dimanche au marché de Saint-Dizier.

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